avant de sombrer

je me suis couchée plus tôt que d'habitude, très tôt, triste et fatiguée, envie de m'isoler et de sombrer dans l'oubli, j'ai à peine lu, j'ai éteint la lumière, j'ai posé le nez sur l'oreiller, je me suis retournée, j'ai préféré remettre le visage dans l'oreiller. J'ai entendu les petits pas de la petite. Elle est venue jusqu'au lit, elle a posé sa main sur ma tête et m'a caressé les cheveux, elle m'a dit quelque chose, je ne me souviens plus, elle m'a parlé, mais je ne sais plus ce qu'elle m'a dit, elle a caressé aussi ma main, je me suis laissé faire, je ne sais plus si je me suis endormie avant qu'elle ne retourne dans sa chambre, je ne me souviens plus, je pense que oui, j'ai du m'endormir avec elle à mes côtés, moi allongée, elle debout, veillant sur moi, comme je l'ai fait si souvent, comme je le fais chaque soir où je suis là, il y avait un je ne sais quoi de saugrenu dans cette inversion de rôle, un sentiment dérangeant, quelque chose de déplacé, elle est trop jeune pour s'occuper ainsi de sa mère, c'était tout à la fois attendrissant, touchant, surprenant, incongru, irrationnel et incorrect.

A 2h47, quand le voisin du 6ème de l'immeuble d'en face  a rejoint son appartement, c'est moi qui suis allée au chevet de ma petite, réveillée à moitié, irritée et égratignée sous ses ongles. Un juste retour à la normale.