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betty black
26 juillet 2013

un an

La dernière fois que je l'ai croisée, c'était chez elle, après l'opération. Elle avait ajouté de la profondeur à ses bonnets, et avait du, à contrecoeur je crois, remercier sa mère de l'avoir tirée d'affaire. Une histoire d'infection et d'absence de prise en charge par le docteur niptuck qui l'avait charcutée.

Ce matin, j'apprends qu'elle vient de passer pas loin, je l'appelle, elle revient sur ses pas, je l'accompagne un bout de chemin. Je trouve qu'elle a grossi, sûrement pour harmoniser sa silhouette avec son artificielle poitrine. Elle me raconte son nouveau choix de vie, elle a démissionné, je remarque qu'elle emploie le même ton et presque les mêmes termes pour en parler que ceux qu'elle a pu tenir l'égard de sa mère un an plus tôt, et aussi un peu pour le médecin, mais dans une moindre mesure. Elle avait très bien toléré le fait d'être triturée comme un morceau de barbaque quand il lui tripotait le postérieur sous un prétexte d'expert esthétique. Elle a décidé dans l'urgence, de tout lâcher, le job, l'appartement de ses rêves acquis avec l'aide de papa maman, la ville qu'elle dit apprécier pour tous ses amis présents. Elle rejoint le frère de son compagnon pour travailler en indépendant, dans une ville de province où elle ne connait personne. Elle y gagnera en qualité de vie, c'est sûr. Et puis elle va tripler son salaire, au moins. Pour les 18 mois à venir. Et après, elle verra. Elle aimerait arrêter, les enfants, le mariage, partir à l'étranger, même si c'est dans un lieu qui ressemble à une cage dorée, partir avec celui avec lequel elle est depuis un an. On dirait qu'elle compte les jours quand elle annonce cette durée. Elle doit trouver que c'est un exploit. Tout va bien, c'est facile, elle ne se prend pas la tête précise-t-elle, comme si elle cherchait aussi à s'en persuader.

Je l'ai connue toute jeune, au tout début de sa vie professionnelle. Encore étudiante, elle était très sympa. Je crois que je me suis leurrée, je lui ai prêté des qualités qu'elle n'a pas, je n'ai pas su voir la petite fille perdue qu'elle est et qu'elle n'arrive pas à faire grandir. Je la trouve attendrissante par son côté fifille, je la trouve agaçante par son côté "non, je ne suis pas que ça, regarde, je peux dire des insultes, être vulgaire, incendier de tous les noms les cons que je fréquente". Je me demande qu'est-ce qui a pu manquer, qu'est-ce qui a fait défaut, où et comment trouvera-t-elle son équilibre intérieur ? Je me demande si ce n'est pas moi qui ait cru voir quelqu'un qui donne à voir ce qu'elle aimerait être et qui, malgré tous ses efforts, n'arrive plus à me donner le change. Je suis un peu triste de constater que nos chemins s'éloignent, peut-être que nous nous croiserons, encore, de loin en loin. Cette sensation laisse un arrière goût amer.

 

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